Publicatie

Les Brigittines en Editions de l’Œil d’or publiceren een boek getield Libres comme demain nous l’apprendra, met teksten die belichten wat Les Brigittines precies inspireert. Het boek geeft ook het woord aan zeventien kunstenaars, die reflecteren over hun werk en over hoe ze in deze wereld staan. Hun bijdragen worden aangevuld met teksten van uitvoerders en dramaturgen, filosofen en schrijvers die de problemen en vragen van onze tijd in een kritisch perspectief plaatsen. Allemaal delen ze het avontuur van Les Brigittines of hebben dat in het verleden gedaan.

Het werk bevat tek­sten van :

Patrick Bon­té
Olivi­er de Sagazan
Kitt John­son
Alexan­der Van­tourn­hout
Aye­len Parolin
Rober­to Castel­lo
Antia Diaz Otero
Pas­cale Gigon
Jes­si­ca Fouché
Nicole Mossoux
Karine Pon­ties
Yas­mine Hugonnet
Mau­ro Paccagnel­la
Cather­ine Gaudet
Jean-Luc Fafchamps
Arco Renz
Euripi­des Laskaridis
Angela Rabaglio & Micaël Flo­rentz
Jan Martens
Ingrid von Wan­toch Rekows­ki

Ste­fan Hert­mans
Dany-Robert Dufour
Roland Gori
Lau­rent Testot
Georges Durieux

Het boek is te koop voor 18 euro.
Verkrijgbaar bij Les Brigittines en in de meeste boekhandels.
Aarzel niet om contact met ons op te nemen: T. +32 (0)2 213 86 10 of ticket@brigittines.be

UITTREKSELS :

HISTORIQUE DES BRIGITTINES

Tout commence avec un lieu, situé au cœur de Bruxelles. Une grande chapelle mono-nef, construite en 1663 dans le style Renaissance italo-flamand et faisant partie du couvent de l’Ordre des Brigittines.

Le couvent disparaît à la fin du XVIII° siècle et la chapelle est désacralisée. On ne sait trop qu’en faire. Tour à tour, elle sert d’hospice, de prison, d’arsenal, de Mont-de piété, de marché couvert, de salle de bal, d’entrepôt, d’école….

La Ville de Bruxelles l’acquiert en 1922 et restaure le bâtiment qui, par la suite, est classé.

A partir de 1975, des spectacles s’y donnent dans des conditions spartiates (sans chauffage sans gradin, un sol de sable et de pierres disjointes…).

En 2007, la Ville décide d’en faire un véritable lieu de spectacle et de le doter d’une infrastructure performante. Le projet est confié à l’architecte italien Andrea Bruno qui propose de cloner la chapelle, d’utiliser le même gabarit pour ajouter un élément contemporain : un jumeau en verre et en acier, abritant une seconde salle et un grand studio ainsi qu’un hall d’accueil et des locaux techniques et administratifs : un volume identique à celui de la chapelle offrant les espaces nécessaires au bon fonctionnement de ce qui devient dès lors le Centre d’Art contemporain du Mouvement de la Ville de Bruxelles.

L'ACTIVITÉ

L’équipe des Brigittines est lancée depuis 2010 dans un projet, amorcé les années précédentes, qui met en avant la recherche et les nouvelles écritures de la scène, essentiellement dans le domaine chorégraphique.

Une saison de créations a été mise en route, centrée sur les chorégraphes de la Fédération Wallonie Bruxelles mais aussi sur les artistes flamands. Nous trouvions que les Brigittines, situées au centre de la capitale d’un Etat bilingue, étaient le lieu idéal pour que se rejoignent, à travers la création artistique, les deux Communautés.

Dans le même temps se sont tissés des liens internationaux avec des structures complices, particulièrement en France, en Italie, en Allemagne et au Québec.

Moment-repère, le Festival international a lieu chaque année au mois d’août et s’appuie sur une formule thématique qui en situe les enjeux : « Abîmes secrets », « La grâce et le désastre », « Antidotes pour époque toxique »…

Un travail de proximité s’est développé avec des associations, des écoles et des habitants des Marolles, le quartier très populaire où sont situées les Brigittines, dans le souvenir tutélaire de Pieter Breughel (la maison où il a vécu se trouve à trois cents mètres).

Il nous a semblé aussi essentiel de conduire des ateliers dramaturgiques avec les étudiants du Master en Arts du Spectacle de l’Université Libre de Bruxelles. L’Université est également associée aux cycles de conférences et d’entretiens centrés autour de questions artistiques, mais aussi sociologiques et philosophiques.

La Chapelle des Brigittines aujourd’hui garde les traces de son histoire mouvementée. Ses murs ont 360 ans : leur patine altérée, laissée en l’état où les siècles l’ont travaillée, en témoigne.

On y pénètre comme dans une bulle hors du temps et de l’espace.

Pourtant, nous sommes en plein centre-ville, les sons extérieurs sont présents, on peut entendre des sirènes de police ou le crissement des trains qui passent par la gare toute proche. Dans ces conditions, inutile d’y présenter des œuvres qui n’incluraient pas le monde actuel d’une façon ou d’une autre dans leur propos ou leur forme. Le contemporain y a trouvé naturellement sa place ainsi que se crée, à chaque spectacle ou concert, un contraste intrigant entre passé et présent.

Ce décalage implicite nous a amenés à y voir une injonction silencieuse mais insistante, jusqu’à en faire un principe : et si la chapelle nous indiquait que rien en elle ne peut être vécu de façon banale ou littérale, que l’immanence n’avait rien à voir avec sa nature, que les événements qu’elle accueillerait désormais seraient de l’ordre de la transfiguration, ou, tout au moins, de la transposition, du décalage, de l’insolite ?

Cela tombait bien : c’était justement la voie que nous voulions suivre ! Défendre et accueillir dans la chapelle des spectacles aux enjeux formels forts et consistants, des opérations de l’esprit et du corps qui font voir différemment le réel, et où l’esprit et le corps créent un double d’eux-mêmes qui participe d’un autre monde.

Notre désir est de dynamiser la création, en donnant aux chorégraphes l’occasion de faire des résidences et des laboratoires, de se faire épauler s’ils le souhaitent par des dramaturges, en produisant et en présentant leurs œuvres lors de séries de trois ou cinq représentations afin que le spectacle puisse vivre et évoluer et que le public puisse prendre le temps d’y assister.

Nos deux salles sont souvent employées pour présenter des soirées doubles.

Des générations différentes se côtoient. Trois langues sont fréquemment utilisées.

Des concerts de musique contemporaine, présentés en partenariat avec d’autres centres et maisons de production, émaillent la saison.

Le Festival International existe depuis 1995. Il a fort évolué au fil des années pour accueillir davantage de spectacles où le geste, l’image, le son, les présences créent des univers inédits, dérangeants, particuliers. Ce n’est pas vraiment un festival de danse, même si les chorégraphes y sont très présents. Nous sommes à la recherche d’objets singuliers : le Festival rassemble une quinzaine de spectacles aux styles très divers mais qui ont en commun de transposer le réel et de créer un langage gestuel ou visuel. Des spectacles fantasmatiques ouvrant sur l’imaginaire.

Souvent ces spectacles sont des premières en Belgique.

Durant toutes ces éditions du Festival, nous nous sommes montrés indifférents à la notoriété des artistes : il nous importait avant tout de ressentir la nécessité de montrer leur travail au public.

Malgré l’organisation des fonctions et le cadre structuré des missions, il y a une fluidité et une souplesse d’action qui, dans le creuset étrange et très ouvert de Bruxelles, sont le signe d’une circulation libre et stimulante.

LE FESTIVAL

L’art n’est-il pas le lieu du singulier qui s’adresse à tous ?

Depuis de nombreuses années, c’est sur ce pari que s’est engagé le festival, avec un objectif précis : présenter des formes originales du spectacle contemporain susceptibles de s’ouvrir à l’imaginaire de chacun. Pour les créateurs, cela signifie partir d’un point de vue décalé, donner à voir et à ressentir différemment le rapport à soi, la relation à l’autre et au monde, aller puiser dans nos troubles, dans nos dénis, dans nos zones de flottement. Ceci afin que la scène puisse jeter du jour sur nos affaires intérieures, quitte à plonger dans l’énigme de la nuit.

Inventer, transposer le réel, tordre l’évidence, suggérer : telles sont les intentions ou les effets que nous recherchons dans les spectacles qui traversent le festival.

Aucune littérature, aucun spectacle ne dépassera en offense ce que le réel nous impose avec ses brutalités et ses entraves. Le moindre journal télévisé témoigne d’une violence qui rend les excès artistiques bien inoffensifs en comparaison. La création, parmi ses multiples fonctions, a certainement ici un rôle d’antidote à jouer : celui d’une étoile dont la lumière magnétique aimante nos attentes d’ailleurs, d’autrement.

Dans le domaine des arts de la scène, le travail des formes opère comme un filtre donnant accès à des perceptions inhabituelles ou surprenantes. Ces formes, ces perceptions sont aujourd’hui en danger. Le monde de l’argent qui nous gouverne et ne considère que la loi du profit, simplifie, oblitère, asservit, et ne peut reconnaitre le caractère libre et émancipateur de la création. Or il s’agit de refuser qu’on la tienne dans des limites convenues et de veiller à ce que l’art reste dangereux et ne perde pas son pouvoir de questionnement, de déstabilisation, d’ouverture des possibles.

Si nous pouvons être saisis par la beauté, il est des moments où le ravissement qu’elle inspire comporte aussi une part obscure, qui complexifie l’émotion, qui la rend plus incertaine, plus riche. C’est par l’outrage assené au confort des sens et de la raison, à la beauté elle-même lorsqu’elle n’aspire qu’à dormir dans des draps propres, que quelque chose tremble et vit. La scène peut se faire le témoin de ce mouvement et les artistes, les ambassadeurs de nos enchantements. Et si certains actes venaient à être considérés comme déconcertants, ils s’accompagnent souvent d’un appel à la connivence et à l’intelligence du spectateur. À son humour.

Parfois, nous sommes frappés par un état de grâce : ce moment où l’éclat de la présence et l’harmonie du geste paraissent indissolublement liés. Mais cet état est naturellement fragile. Il s’accompagne de la sensation qu’il peut soudain s’évanouir, qu’il n’est qu’un instant d’exception dont rien ne peut garantir la pérennité. Et lorsqu’il disparaît, c’est la déception, la chute. La cime côtoie alors l’abîme. C’est pourtant sur cette ligne de crête, sur ce chemin incertain que l’œuvre peut nous faire voyager et nous toucher. Quelquefois, il arrive qu’elle échappe à son créateur pour atteindre une apesanteur où plus personne ne semble à la manœuvre alors que nous sommes tous là, spectateurs et artistes, saisis que cela se passe. Au plus profond de nous, nous sommes mis en mouvement.

Toute œuvre s’entend par les échappées qu’elle suscite, les audaces qu’elle encourage. Si l’art ne guérit pas, et même s’il véhicule ses propres venins, il déverrouille des portes, dégage des voies, annonce des aurores qui sauvent des crépuscules. Une chose est sûre : face à la banalité qui mine nos scènes et nos écrans, la seule action pertinente est de promouvoir les pouvoirs de l’invention, de protéger les territoires de l’imaginaire et leurs messagers. Les artistes sont comme des pilotes qui piratent les idées reçues, qui sabrent le premier degré et partent à l’abordage de l’inédit.

Car notre cœur bat ailleurs, non ? À Poddema, à Combray dans les steppes de l’enfance, sur le rivage des Syrtes. Notre cœur bat pour les yeux d’Anna Karénine, pour le destin de Germinal. Il bat pour Hamlet, pour Lol V. Stein, pour Sailor et Lula… Pour la recherche d’un univers de sens qui est celui de nos songes et d’un au-delà qui nous restitue l’étendue.

Par leur langage symbolique et leur polysémie, la création artistique et le rêve partagent de nombreuses analogies, mais aussi une dimension critique, puisque, dans l’un et l’autre domaine, nous est montré sans ménagement ce que notre esprit conscient hésite à percevoir.

Voulons-nous être emportés vivants dans l’imaginaire de la scène ou y voir un miroir de ce que nous connaissons déjà ? L’esprit du jour s’accorderait-il seulement à l’effet de réel, à la demande faite à la fiction de se conformer aux faits, aux bien-pensances et aux stéréotypes à la mode ?

Se laisser troubler dans ses tréfonds, tout est là !

Atteindre des zones mal définies de l’être et de l’acte, car c’est, au bout du compte, toujours de cela dont il est question : créer un univers dans lequel le spectateur puisse se perdre et se trouver. Dans cette perte, il se reconnait diffèrent, et dans cette différence s’invente l’humanité.

Patrick Bonté